MEDICIS EN MODE BULLE PONTIFE

Non classé

L’époque bénie où ne rien apprendre suffisait pour passer pour un génie continue de produire ses élèves. Et voilà que De Villemorin des Jardins, ce dandy céleste et peintre maudit qui n’a jamais eu besoin de l’IFM pour comprendre qu’une manche pouvait se coudre à l’envers, est désormais célébré comme un prophète des oripeaux. À ses côtés, Prune Delon, « Masterisée » terme savant pour dire qu’elle a appris à parler du vide avec gravité incarne parfaitement ce master devenu l’art d’apprendre… à ne rien apprendre. Tous deux se retrouvent à Rome, parce qu’à broder du vent, autant le faire sous les fresques du Vatican.

Et qui croise-t-on dans ce carnaval créatif ? Le fondateur de Pigalle, celui qui a élevé le jogging au rang de haute couture et transformé les survêtements des JO de Paris en manifeste esthétique. Un triomphe du molleton sur la raison, une ode à la fermeture éclair. Tout ce petit monde vient représenter la France qui rayonnerait, paraît-il, quelque part entre deux scratchs et un logo oversize. Si le style est la forme du charabia, alors voici les poètes du polyester made in China.

Pourtant, ne soyons pas mesquins : derrière cette machine à storytelling bien huilée, il y aurait une vision. Charles veut « interroger l’artisanat et la place du vêtement dans l’art », autrement dit recoudre avec élégance ce que Zara détricote à la chaîne. Prune, elle, lance son projet « Prêt à teindre », une révélation chromatique censée révolutionner la couleur (comme si personne n’avait jamais pensé à plonger un tissu dans un bain de teinture avant elle). Le tout servi avec un vocabulaire d’incubateur culturel à la Dominique Jacobin : « processus créatif », « dialogue interdisciplinaire », « pratiques hybrides ». On croirait feuilleter une plaquette d’école de commerce recyclée en manifeste artistique façon Pascal Marand.

Pendant que ce petit théâtre s’autocongratule à la Villa Médicis, désormais ouverte à la mode donc fermée à la modestie, on nous vend tout cela comme l’avant-garde de la pensée textile. Un véritable bûcher des vanités où l’aiguille ne pique plus que l’ego. Rome, ville ouverte, ne l’est plus : elle devient la capitale du reflux gastrique vestimentaire. On y brode des concepts, on y ourle du vide, on y repasse du creux. L’art, paraît-il, est partout. Même et surtout là où il n’y a plus rien à coudre.

FM