MIU MIU COUTURE ET BASSE BESOGNE

Non classé

Il fallait bien que le retour de la concierge espagnole signée Prada arrive un jour ! Ainsi, après avoir libéré les corps, Miuccia veut enfermer les corps dans des uniformes de service, et au passage, la mode y a glissé aussi les esprits bien serrés comme dans un sac de linge sale… Les vêtements de travail, naguère symboles d’effort et de sueur, deviennent à présent des parures de dévotion domestique. On nous vante la beauté du bleu de chauffe, la noblesse du tablier, la grâce silencieuse de la femme qui polit le sol comme on polirait une icône. Miuccia Prada, grande prêtresse du paradoxe, transforme la servitude en esthétique et soudain, la cuisine devient podium.

Sous prétexte d’explorer le vêtement utilitaire, on réhabilite sans ciller les outils de l’asservissement. Quelle audace, quelle ironie du progrès : l’ouvrière, jadis symbole d’émancipation, redevient l’image rêvée du dévouement discret. Le féminisme passe à la machine, cycle « délicat ».

Ce qu’on nous vend ici n’est pas un style, mais un retour à l’ordre, un ordre bien repassé, amidonné, prêt à remettre la femme à sa place : derrière le plan de travail, dans la lueur stérile des néons, à genoux devant le four comme devant un autel. La mode applaudit, les magazines s’extasient, et la Wintour qui n’a jamais vu de sa vie une cuisine tremble de sueur, ainsi la Fashion Week rejoue en talons aiguille, la vieille comédie patriarcale.

Car enfin, sous la soie et le nylon, qu’y a-t-il ? Le fantasme d’une docilité retrouvée. On habille le corps féminin d’un langage d’usine, on fait passer la contrainte pour élégance, la soumission pour concept. L’ouvrière devient muse, mais jamais patronne. Et pendant que le monde salue la « modernité » de la proposition, c’est le XIXᵉ siècle qui reprend du service. Mais cela n’est pas galant, je le sais « mais c’est de son âge » enfin le mien aussi.

FM