PRADA ACCIDENT CHROMATIQUE
On dit souvent que la maison Prada aime prendre des risques, mais avec cette collection, tellement en avance sur son temps, elle ne croisera jamais ses contemporains, elle se perdra sur la route d’une réflexion de palefrenier, (je panse donc j’essuie). Ici, la « Pradamania Raf », l’ex de chez Dior, semble avoir confondu audace et accident visuel. Ce défilé restera sans doute dans les mémoires, mais comme un concentré de mauvais goût soigneusement emballé dans du gros-grain.
Les polos preppy (un courant de mode adopté dans les années 1950 par les Américains de classe supérieure des Hamptons), déjà peu flatteurs dans leur version originale, sont ici déclinés en fragments instables, comme si le créateur ne savait pas coudre, un de plus ! Résultat : voilà le ridicule d’un campus américain en cosplay aristocratique. Les robes de cocktail, elles, étaient si amples qu’on les aurait crues recyclées des rideaux du film « Autant en emporte le Vlan ». Les colliers-bijoux plaqués au col donnaient plus l’impression d’un bricolage de carnaval Berrichon.
Une jupe a subi toutes les tortures possibles : boule, plissée, crayon, kilt, dirndl (tenue bavaroise, portée par les femmes de l’Oktoberfest), et dentelle du soir… un patchwork incohérent, ficelé d’un ruban comme on referme à la hâte un paquet-cadeau à la Samaritaine.
Mais, c’est sans doute la palette de couleurs qui a achevé le massacre. Le sol couleur mandarine « pour les Chinois peut-être » faisait office de piste d’atterrissage pour une armée de bimbos criardes en robe qui crient « orange is the new black« . Plus proche d’un rayon soldes de la fast fashion que d’une maison de luxe, et l’ensemble donnait à voir une explosion de néons mal maîtrisés. On peut saluer le courage de « Raf Simonstre » d’oser le « moche ». Mais, entre ironie et naufrage, la frontière est mince : ici, elle a tout simplement disparu.
FM