FONDATION CARTIER LES FORMES ET LES OMBRES DU MONDE

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À la nouvelle Fondation Cartier, les formes du vivant et les ombres du monde me font plonger dans un monde en suspension, entre mémoire et métamorphose, où la création contemporaine se tient à la croisée du sensible et du politique. Je remercie son président de son invitation. Voilà ce que j’y ai vu et ressenti.

Entre le sous-marin du général Poutine, vestige d’un imaginaire guerrier, les relations entre la science-fiction et la création artistique se font mienne, comme un fantôme de l’histoire moderne qui réémerge. L’exposition se déploie comme une respiration de quarante ans de création internationale condensée dans un seul espace. La Collection de la Fondation Cartier n’expose pas seulement des œuvres; elle dévoile une manière de penser, de regarder et d’habiter le monde.

Le parcours qui s’offre à nous est comme un fleuve d’idées et de songes : il condense les élans du progrès, les légendes des futurs possibles, les rêveries de l’astronomie et les ombres des mondes techniques et dystopiques où l’homme cherchant à se dépasser, se contemple et se perd tout à la fois. La fondation avance comme un récit vivant, au travers des gestes et des regards qui ont façonné son histoire depuis 1984. Maquettes, fragments, dessins, installations, tout y parle, tout s’y répond. Les artistes y inventent des langages pour dire la fragilité du vivant, l’urgence du monde, la beauté persistante de ce qui résiste à la destruction.

Ce laboratoire architectural, véritable ville réinventée, s’ouvre sur un dialogue entre l’urbain et le naturel : les bâtiments rêvent, les forêts respirent, ainsi les machines, bon an, mal ans’humanisent. À travers cette chorégraphie d’objets et d’idées, la Fondation questionne le rôle même de l’institution : peut-elle encore conserver sans figer ? montrer sans dominer ?

En tissant les formes humaines, mais aussi les non-humaines, les cultures, les techniques et les savoirs, c’est l’esquisse d’une nouvelle géographie du sensible. Elle s’émancipe de la hiérarchie des beaux-arts, préférant la conversation à la classification, la vie à l’archive. Ici, la collection devient organisme : mouvante, perméable, indisciplinée, comme son bâtiment.

Au fond, cette exposition n’est pas tant une rétrospective qu’une promesse : celle d’un art qui ne cherche plus à représenter le monde, mais à le réparer. À noter un moment tout en émotion avec les dessins de David Lynch, mais surtout quand j’ai vu les brise-lames de Saint-Malo que mon beau-père avait livrés à la ville, exposés en plein cœur de Paris. Un peu pompeux comme texte, je l’avoue, mais je vous conseille d’y aller.

FM