SHEIN LE GRAND LAVAGE A 30 DEGRÉS DE CYNISME

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SHEIN, cet ogre est-il un drôle ? Ce Jonas de contrebande dépose sur le bitume du Châtelet, par un hoquet imprévu d’un Grand Collecteur Trabucaire, le tam-tam de la calomnie et de la mode. Bref au BHV, la fast-fashion entre en religion, et Paris allume un cierge en polyester, car le 5 novembre à 13 h précise, pendant que certains du quartier iront déjeuner d’un quinoa tiède en songeant à la fin du monde, d’autres se presseront au BHV pour assister à un événement d’une portée historique : l’ouverture du tout premier magasin physique au monde de la marque chinoise.

Voilà donc le temple du made-in-n’importe-où qui s’installe dans le cœur battant de la capitale, sous les voûtes respectables du Bazar de l’Hôtel de Ville et face à un autre Bazar, celui de la Reine Magot. Paris, ville de couture, capitale de la mode, berceau de Dior, Chanel et Saint Laurent, accueille désormais son ennemi.  Merci les Pascal Marrant et les « riz volant » de ne rien faire pour que cette marque connue comme le « houblon » ne puisse venir vendre un pull à 2,99 € qui sent le kérosène.

Le patron, Frédéric Merlin (qui n’est pas Leroy), a fièrement posté sur Instagram : « Première mondiale ». Rien de moins. On aurait presque envie d’applaudir. Après tout, la France a toujours aimé les révolutions. Nous avons eu 1789, 1848, 1968… et maintenant, 2025, l’année où la fast-fashion a « pognon sur rue, ou sur Riz, c’est selon…

SHEIN, c’est ce miracle moderne : des robes livrées plus vite qu’un livreur Uber Eats, cousues par des mains invisibles à l’autre bout du monde, dans des ateliers qui sentent moins le parfum que la performance des esclaves Ouïghour. Mais qu’importe ! Le polyester est la nouvelle soie, le clic la nouvelle aiguille, et le low cost le nouveau luxe.

Ironie suprême, ce premier magasin où de jeunes créateurs français rêveraient d’un espace, d’une vitrine, d’un bail pour vendre leur produit, l’empire du milieu le privatise pour 18 mois. Mais, peut-être que SHEIN leur laissera un peu de place, entre deux rayons, remplissant ainsi le rôle des institutions dirigeantes, qui ne dirigent rien.

Le BHV, autrefois bastion du tournevis et du « buffet campagnard gratuit », se réinvente en cathédrale du « prêt-à-jeter« . On y priera certainement bientôt, pour le salut du textile, parce que derrière les projecteurs, il y a quand même cette question, un peu gênante : combien vaut une robe à 3 € quand on la paie autrement qu’en dignité ?

Shein, déjà symbole d’une mode jetable fabriquée à la chaîne franchit aujourd’hui un seuil ignoble : vendre, sur son site, une poupée sexuelle reproduisant le corps d’une fillette. Un objet de cauchemar présenté comme un « jouet de masturbation masculine » l’enfance travestie en marchandise.

Shein, ce n’est plus seulement la fast-fashion. C’est la fast-déchéance. Ce n’est plus un modèle économique ; c’est une machine à désensibiliser. Après avoir banalisé la surconsommation, voilà qu’elle banalise l’indicible : la sexualisation de l’enfant, pour 186,94 euros, le prix d’une honte industrialisée.

Ce produit ne relève pas d’un « accident » ou d’un « partenaire tiers ». Il révèle la faillite d’un système sans filtre, sans éthique, où l’algorithme décide de ce qui est vendable,voire l’innommable.

Mais, « Chut Chut », le magasin entre dans l’histoire de la consommation mondialisée : une vitrine propre, pour un monde vraiment très sale, où certains se lavent les mains, et d’autres se roulent dans leurs pensées, avec l’esprit si souillé, qu’un bain de moralité n’y aurait rien changé.

FM