LES OCÉANS DU CŒUR

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Il est des âmes qui portent en elles l’immensité des océans. Elles se lèvent à l’aube avec l’idée de franchir les tempêtes pour un être aimé, d’épuiser leurs forces à nourrir une flamme qui souvent ne réchauffe qu’un seul visage. Cette générosité, qui semble naturelle aux esprits candides, ressemble à une offrande permanente : donner sans compter, s’excuser sans faute, se plier sans contrainte.

Mais l’expérience, maîtresse impitoyable, apprend à ces âmes qu’il existe des rivages déserts. On croit rejoindre une terre hospitalière ; on n’y trouve que silence ou indifférence. Le voyageur au grand cœur découvre alors que l’autre n’est point ce miroir fidèle où se refléterait sa propre tendresse.

L’erreur n’est pas d’aimer, mais de croire que chacun possède le même ciel intérieur. Chacun abrite en soi des vents contraires ; certains n’ont qu’une brise légère, d’autres une tempête déchaînée. Vouloir que tous portent le même horizon, c’est se condamner à l’amertume.

Alors, vient l’heure où l’on cesse d’attendre que l’océan soit traversé en retour. L’âme généreuse apprend à distinguer son propre éclat de celui du monde. Elle n’est plus déçue des autres, car elle sait enfin que la vérité du cœur n’est pas universelle. Il ne lui reste plus qu’à être fidèle à sa propre lumière, sans la mesurer à l’indifférence d’autrui. Ainsi, l’innocence se mue en sagesse. Ce n’est pas le monde qui nous blesse : c’est le voile que nous jetions sur lui.

FM