HOCKNEY CHEZ VUITTON

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David Hockney s’expose à la Fondation Louis Vuitton, et il faut bien dire que tout y est : les grands formats, les couleurs explosives, la petite dose de non subversif, et très calibrée, avec surtout, une mise en scène millimétrée. Mais alors, que voit-on vraiment ? Du Hockney, certes, mais aussi beaucoup de Vuitton.

La Fondation, cette cathédrale du luxe contemporain, signée Gehry, continue son numéro d’équilibriste entre art et image de marque. Elle nous vend de la culture comme on vendrait un sac Capucines avec le vernis de storytelling et la vitrine impeccable. Hockney, avec son brushing blond et ses cigarettes dessinées, coche toutes les cases : star mondiale, octogénaire facétieux, et artiste “qui ose encore la couleur” dans un monde saturé de gris numérique. Il est parfait pour l’affiche. Un peu trop parfait ?

Le parcours est généreux, immersif, visuellement très fort, et le recours à une palette de couleurs vives, bien que charmant pour certains, pourrait être considérée comme une identité visuelle stagnante plutôt qu’une justification théorique profonde. Mais à force de vouloir nous en mettre plein les yeux, l’exposition finit par ressembler à une sorte de Disneyland Arty : tout est grand, tout est “bigger”, et surtout tout est “Hockneyland”.

Mais qui tient les manettes de ce parc d’attractions visuel ? Hockney lui-même, bien sûr, mais aussi supervisé et secondé par son compagnon et son fidèle studio manager. Et puis, il y a cette fameuse affiche censurée, où l’artiste se représente avec une cigarette. Provocation ? Clin d’œil ? Rébellion molle ? À 88 ans, Hockney joue encore au punk, mais un punk parfaitement compatible avec la communication d’un groupe de luxe. C’est transgressif, mais juste ce qu’il faut pour le groupe.

Ne soyons pas injustes, ses tableaux continuent de manipuler la perspective comme un magicien, tordant les lignes de fuite, éclaboussant la toile de vert acide et de roses improbables. Il y a du souffle, de la sincérité certainement, parfois même une émotion inattendue, surtout dans les paysages d’hiver ou les grands panoramas mélancoliques.

Mais là encore, le message est enveloppé, encadré, filtré. Hockney parle de mort, de solitude, de temps qui passe… mais tout cela passe comme une jolie carte postale. On admire, on photographie, on repart avec le sentiment d’avoir “vu quelque chose”, sans trop savoir quoi.

C’est beau, c’est propre, c’est luxueux, mais peut-être un peu trop. Hockney a encore des choses à dire, mais dans ce temple Vuittonisé de l’art-spectacle, sa voix semble couverte par le bruit de fond du branding. Cependant, dans la collection privée du seigneur, il existe un petit Hockney, ceci explique probablement cette mise en avant. Mais dans quel monde Vuitton !

FM